mardi 27 novembre 2012

Miroirs



            Ca court à la maison ce soir. La Maman, elle a dit « Ca ! Tu vas mettre ça ! ». Alors la gamine, elle est heureuse parce que cet ensemble ressemble à celui de la Maman, qui est toujours bien habillée, bien maquillée, comme sur les magazines qu’elle achète mais que la gamine n’a pas le droit de toucher. Mais qui font envie, parce qu’ils brillent, ils rutilent de couleurs criardes sur papier glacé. Glacé comme la Maman quand elle prend la gamine en train de les voler. Ce qui reste de chaleur après le passage de la main de la Maman sur le visage de la gamine, c’est la brûlure de la gifle. Mais ça, « c’est comme ça ». 

           Ca court à la maison ce soir. La Maman elle a dit « Viens aider maintenant ! ». Alors la gamine, elle est heureuse parce qu’elle va pouvoir cuisiner comme la Maman. Elle découpe des carrés dans le pain pendant que la Maman continue de courir en faisant plein de bruit avec les casseroles. Elle a donné des pots à la gamine avec plein de choses dedans, et elle a posé la soeur à côté pour qu’elle aide aussi. Mais elle est trop petite, la soeur, elle joue avec les petits œufs tout noirs qu’il y a dans les pots, au lieu de les mettre sur les morceaux de pain en carrés. La gamine lui a dit que c’était pas bien, qu’il fallait pas les mettre comme ça, mais la soeur s’énerve, et fait du bruit. La gamine commence à avoir un peu peur parce qu’avec le bruit des casseroles, ça commence à irriter les oreilles de la Maman, elle le sent, c’est dans l’air, ça râle. Ca va tomber, mais sur laquelle ? Paf, sur la gamine, parce que c’est la plus grande, l’avait qu’à surveiller la sœur. Ca a calmé la Maman, elle fait même des bisous à la gamine, et elle l’aide à terminer ses pains carrés. La soeur s’énerve plus et fait plus de bruit. C’est déjà ça.

            Ca court toujours à la maison ce soir. La Maman elle a dit « Allez venez, on va mettre la table, maintenant ! ». Et là, la gamine elle est toute excitée parce qu’on passe au salon et qu’on allume les éclairages indirects et les bougies. Ca sent bon, c’est joli, orangé, et ça annonce les invités et la musique. La Maman, elle adore Glenn Miller, et quand il y a des gens qui viennent à la maison, elle met toujours le disque, et quand la gamine entend les premières notes retentir, elle ne pense plus à mettre la table, mais à courir autour. Ca énerve la soeur qui lui court après, et là, la gamine se dit que la musique associée au bruit de la soeur qui s’énerve, vaudrait mieux arrêter. La Maman avait l’air fâché, mais elle s’est calmée. Elle pose les couverts en argent sur la table en regardant la gamine, qui comprend. Calmement, elle prend les fourchettes, les couteaux, les cuillers, tout ça ensemble dans ses petites mains, et dispose tout comme la Maman elle lui a appris à faire. La soeur est partie jouer dans sa chambre, faudrait pas qu’elle casse les verres. "Ah non, faudrait pas, ça".

            Ca fourmille à la maison ce soir, y’a plein de gens qui arrivent. La Maman, elle commence à changer. Le Papa, il est descendu, il s’est réveillé. La Maman se tient droite, elle sourit, elle a l’air détendu, pourtant elle est vraiment toute droite. La gamine est près de la porte et elle l’observe. Elle se tient comme elle parce que c’est joli, la taille fine, les épaules découvertes et la tête coiffée d’un chignon. Sauf que la gamine n’a pas eu le droit de faire de chignon, elle a dû mettre son serre-tête. Encore. « C’est comme ça ».

            Ca dévore et ça boit à la maison ce soir, y’a plein de gens qui parlent et qui rient. La Maman, elle s’est transformée. Elle est plus raide du tout, elle appuie son coude sur la table et elle met son menton dans le creux sa main, tout en parlant avec les invités qui mangent et qui boivent. C’est joli, comme elle est bancale, la Maman, la gamine la voit pas souvent comme ça. Elle met aussi son coude sur la table, mais ça fait pas pareil, elle peut pas mettre son menton dans le creux de sa main comme le fait la Maman, parce qu’elle est trop petite. Elle appuie sa joue dessus. Mais c’est pas grave parce qu’elle est toute bancale aussi. Mais d’un coup, la Maman, elle se fâche : « Ne te tiens pas avachie comme ça, c’est pas beau ! ». La gamine comprend pas bien, mais elle enlève le coude de sur la table et met ses mains dessous. Elle regarde les gens autour, ils mangent, ils boivent, certains les coudes sur la table, d’autres les mains sous la table. Hop ! La Maman, elle se fâche encore, parce qu’on mange avec ses mains sur la table, pas en dessous. La gamine… elle est un peu surprise, elle comprend plus bien, donc elle met ses mains à plat autour de son assiette. La soeur, elle, elle joue avec ce qu’il y a dedans. La Maman se calme et même qu’elle sourit, elle les regarde toutes les deux. Les mains autour de l’assiette. « C’est comme ça. »

            Ca boit et ça boit à la maison ce soir, y’a plein de gens qui parlent et qui rient. La Maman aussi, elle rit beaucoup, elle est vraiment plus du tout comme d’habitude maintenant. Le Papa, il pique du nez dans son assiette. Il a mis ses coudes sur la table et tient sa tête entre ses deux mains. La gamine, elle comprend pas ce qu’il a le Papa et pourquoi la Maman elle lui dit rien. Alors elle demande à la soeur ce qu’il a, le Papa, mais elle joue toujours avec ce qu’il y a dans son assiette et elle répond pas. De toute façon, personne comprend jamais quand elle répond, celle-là. Alors la gamine essaie de demander à la Maman. C’est toujours difficile de demander quelque chose à la Maman quand il y a des invités qui viennent à la maison, parce qu’on dirait que les questions de la gamine sont émises sur une autre fréquence. « Maman… Maman… Maman... Maman… Pourquoi il dort le Papa et pourquoi il a les coudes sur la table ? ». « Oui ma chérie ». Et là Maman, elle se remet à discuter avec les autres invités. Quand t’es petit, on t’entend pas. C’est comme ça.  

            Ca boit et ça boit toujours à la maison ce soir, y’a plein de gens qui chantent. La Maman aussi, elle chante. Le Papa, il est remonté, pour dormir dans le lit, les coudes où il veut. Les gamines s’ennuient, y’a plus d’assiettes. Elles ont demandé le droit de sortir de table, mais la Maman elle s’est fâchée, elle n’a pas voulu "parce que ça n’était pas poli pour les invités ". La gamine a alors demandé pourquoi le Papa était remonté, et pourquoi elles pouvaient pas monter aussi parce qu’on les écoutait pas et qu’on les regardait pas, d’abord! Et là, la Maman elle a encore utilisé l’archer sans colophane qui fait que rien ne sort plus des cordes vocales de la gamine : « Je suis ta mère, tu me dois le respect et c’est comme ça ». 

            C’est calme et c’est paisible à la maison maintenant. La Maman, elle chante plus, elle boit plus, elle traîne en bougeant lentement les hanches. C’est joli. La soeur, elle est au lit parce qu’elle a fait comme le Papa, sauf qu’elle a pas mis la tête dans ses mains, et qu’elle a mis le nez dans son gâteau et qu’elle s’est encore énervée. Ca a fait du bruit ! La table est débarrassée, les invités ont absolument voulu aider la Maman qui disait que c’était pas la peine, que la gamine, elle était là pour ça. Mais en fait, elle était très contente la Maman, c’était vite fait. Elle s’est assise dans le fauteuil et elle a dit à la gamine de venir s’asseoir sur l’accoudoir. Elle la regarde maintenant sans la voir on dirait, elle est vraiment pas comme d’habitude la Maman. Elle est fatiguée, qu’elle se dit la gamine. La Maman la prend dans ses bras et la berce en lui faisant des bisous. Elle aime bien, la gamine, quand c’est comme ça. C’est comme quand la soeur, elle était pas là. Comme quand les invités, ils sont pas là. Elle ressent plus que jamais l’admiration qu’elle porte à la Maman, là, maintenant. Parce que c’est comme ça.

dimanche 15 avril 2012

WASP

Hommage à Lisbeth Salander brillamment interprétée par Rooney Mara dans le film de David Fincher "Millenium, les hommes qui n'aimaient pas les femmes". Graphite, papiers collés, feutre, environ 3h30.

mercredi 11 avril 2012

"Monstres Invisibles"


Voilà mon hommage aux "Monstres Invisibles" de Chuck Palahniuk. Ca faisait presque un an que je n'avais pas fait quelque chose qui me plaise réellement. Comme d'habitude, j'ai utilisé du papier collé, graphite, feutre, gouache et même du mascara. 

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mercredi 6 avril 2011

Nighthawks at the diner

Graphite et papiers collés

Autoportrait


Autoportrait réalisé au feutre

samedi 4 septembre 2010

Wherever I lay my Head

Dessin au feutre noir et papiers collés, 24 x 32 cm, 60€

jeudi 26 août 2010

Hommage à Camille Martin

Retour de vacances! Nancy, ça inspire! J'y ai découvert un artiste exceptionnel, Camille Martin. Je n'ai pas résisté à faire son portrait.

Papiers collés et marqueur blanc